China.org : Nous savons que l'année dernière a été difficile pour l'économie chinoise et mondiale, la première partie de cette édition spéciale est ? l'empire du business ? ; pourriez-vous donner votre appréciation sur la réaction du gouvernement chinois face à cette crise ?
Caroline Puel : Je pense que cela a été une réaction très habile, d'abord car elle a été rapide. Il y a eu très vite la mise en place, ou en tout cas l'annonce de ce plan de relance avec un montant très élevé. On sait qu'une partie de ce montant existait déjà, le projet était déjà envisagé, mais ce qui a été très efficace a été cet accélérateur dans le processus, qui a permis à la Chine de s'ajuster très rapidement au changement de contexte.
La deuxième chose était évidemment de prendre en compte le co?t social, et donc le problème de tous ces ouvriers qui allaient se retrouver sans emploi pendant une durée indéterminée, et je pense que de ce point de vue, à quelques exceptions près, le calme social a plut?t régné dans cette période. Il est vrai qu'il y avait cette souplesse de voir beaucoup de migrants qui ont accepté de rentrer dans leur village d'origine et d'attendre un peu que la situation s'améliore pour revenir vers les zones de fort développement, mais néanmoins cela a créé une sorte de matelas social.
En comparaison, en Europe, et notamment en France, on parle toujours du matelas social du système fran?ais. Cela vient du fait qu'il y a, en cas de ch?mage, une assurance ch?mage qui se met en place et qui dure à peu près deux ans et qui donne aux gens le temps de se retourner, soit pour faire une formation, soit pour trouver un nouvel emploi. Cela fait que la société fran?aise n'a jusqu'à aujourd'hui pas trop bougé. Je dirais que le matelas social chinois est très différent, puisqu'il s'agit en fait de laisser les paysans revenir chez eux, et ce n'est pas forcément dans des conditions très faciles, car ils vont se retrouver du jour au lendemain sans salaire.
Ce qui est intéressant est qu'il y a eu le troisième relai qui me para?t très important, qui était cette recherche menée par le ministre de la Santé sur la mise en place d'une assurance santé et une assurance vieillesse. On sait que cela ne va pas avoir lieu en trois jours, mais néanmoins il est vraiment important que ce processus se mette en place.
Je dirais donc que globalement, sur ces trois points, les choses ont été bien gérées. Il y a eu des domaines sur lesquels on peut considérer que les choses sont peut-être allées un peu trop vite, notamment dans le sud de la Chine, lorsque la crise a accéléré une vague de délocalisations d'entreprises vers des pays voisins où la main-d'?uvre est moins chère, par exemple le Vietnam et certains pays d'Asie du Sud-est. Peut-être que de ce point de vue là, il aura fallu réenvisager les choses, et la fermeture de trop d'usines à eu un co?t important en matière sociale.
La crise n'est pas complètement finie, le monde occidental va mal et est encore très touché. Aux états-Unis, même si les chiffres de la croissance sont meilleurs que ce que l'on pensait, il n'y a pas encore véritablement de reprise assurée. En France, et en Europe de manière générale, on est encore au c?ur de la crise puisque c'est maintenant la deuxième phase, c'est-à-dire la phase sociale, et donc le co?t notamment sur le ch?mage est extrêmement élevé.
Cela va évidemment maintenir le ralentissement des exportations qui intéressaient la Chine, et de ce point de vue aussi il est important que la Chine se retourne vers son marché intérieur, mais cela va prendre du temps, plusieurs années. Personne n'est donc encore totalement sorti de la crise aujourd'hui, je crois que c'est un peu t?t pour le considérer, même si effectivement la Chine est sortie beaucoup plus vite que les autres de cette période.
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