Des idées erronées conduisent à une fausse impression sur la Chine
C'est un livre qui reprend la pensée conventionnelle, pour ne pas parler de préjugés, de nombreux Américains à l'égard de la Chine et qui la renverse. Cela ne pouvait pas tomber à un meilleur moment, à quelques jours de la première visite d’Etat en Chine du président américain Donald Trump, à un moment où les idées erronées sur la Chine semblent être aussi répandues à la Maison Blanche que dans un foyer américain moyen.
L'ancien directeur de la Banque mondiale pour la Chine, Yukon Huang, a présenté la semaine dernière son nouveau livre, Cracking the China Conundrum: Why Conventional Economic Wisdom Is Wrong, au siège de la Banque mondiale à Washington.
M. Huang, qui est aussi membre du Carnegie Endowment for International Peace, est revenu lors d'une conférence organisée le 27 octobre à l’occasion de la sortie de son livre sur l’affirmation de Donald Trump et ses conseillers que trop d'investissements directs étrangers américains se dirigent vers la Chine, entra?nant des pertes d'emplois et une baisse de compétitivité.
? Nous avons laissé des emplois partir à l'étranger, nous avons laissé des emplois partir en Chine, nous devons les ramener ici ?, a déclaré le président. En réalité, seulement 1,5 % des investissements étrangers américains se dirigent vers la Chine, a noté M. Huang, statistiques et tableaux à l’appui.
? Dans mon livre, j'explique cela par la structure du commerce et je souligne que si nous obtenons un mauvais diagnostic, nous prenons de mauvaises décisions politiques ?, a-t-il déclaré. ? Il s'agit de savoir comment obtenir plus d'investissements étrangers américains en Chine, plut?t que de s'inquiéter du flux qui se dirige vers la Chine. ?
S'exprimant lors d'une table ronde sur les résultats et l'analyse du 19e Congrès national du PCC en Chine, un événement parrainé par la US-China Policy Foundation le 26 octobre, M. Huang a fait remarquer que beaucoup d'Américains partageaient l’idée de Donald Trump selon laquelle la Chine serait responsable des déficits commerciaux américains.
Ces déficits étaient importants dans les années 1990 et ont augmenté en 2006, avant de devenir plus modérés. Les excédents commerciaux de la Chine étaient pratiquement inexistants jusqu'en 2004 ou 2005, puis ont commencé à devenir très importants avant de chuter, a noté M. Huang.
? La balance commerciale des Etats-Unis et celle de la Chine avancent dans la mauvaise direction ?, a-t-il déclaré.
Dans son livre, il soutient que ce phénomène résulte davantage des relations multilatérales que des relations bilatérales.
? Comment la Chine pourrait-elle être responsable des problèmes commerciaux de l'Amérique, alors qu'en réalité, ces problèmes existaient bien avant que la Chine ne devienne une puissance exportatrice et que leurs balances respectives évoluent dans des directions opposées ? ?, écrit-il dans son livre.
Les perceptions erronées sur le commerce ont créé une fausse impression aux Etats-Unis en faisant oublier à certains que le pays reste la première puissance économique mondiale, selon M. Huang.
Il y a une dizaine d'années, les sondages annuels Gallup et Pew auprès des citoyens américains sur la première puissance économique mondiale donnaient une réponse claire : l'Amérique était de loin vue comme la principale puissance économique. Seulement 10 % pensaient qu’il s’agissait de la Chine, a déclaré M. Huang lors de la table ronde.
Aujourd'hui, la majorité des Américains disent que la Chine est la première puissance économique mondiale, tandis que la grande majorité des Chinois pensent toujours que c’est l'Amérique, a observé M. Huang.
La grande majorité des analystes chinois soutiennent qu'un rééquilibrage interne est nécessaire, et cette opinion a pris une place importante dans les discussions gouvernementales entre la Chine avec les Etats-Unis.
En dépit de ses performances impressionnantes, la Chine a connu un processus de croissance déséquilibré, défini par une part exceptionnellement faible occupée par la consommation dans le PIB, et une part élevée d'investissement.
M. Huang estime que pour résoudre l'énigme posée par la Chine, il n’est pas question d’opinion positive ou négative sur l'économie chinoise et ses implications pour les Etats-Unis. Il faudra placer la Chine dans une vision menant à une meilleure compréhension de la réalité.